Cette petite commune suisse a pris une mesure radicale qui fait déjà polémique des deux côtés de la frontière. En interdisant l’accès de sa piscine à 95 % de ses usagers habituels, Porrentruy justifie sa décision par des incidents répétés et la volonté de restaurer la tranquillité des lieux. Ce que révèle cette controverse estivale soulève des questions plus larges sur la gestion des espaces publics transfrontaliers et les tensions qui peuvent s’y cristalliser.
L’été 2025 débute par un coup de tonnerre à Porrentruy. Cette petite commune suisse, située à quelques kilomètres de la frontière française, vient d’adopter une mesure qui défraie la chronique : l’interdiction d’accès à sa piscine municipale pour les visiteurs français.
Le règlement, d’une simplicité déconcertante, réserve désormais l’entrée aux seuls citoyens suisses, résidents légaux et détenteurs d’un permis de travail en Suisse. Une décision qui frappe de plein fouet les habitudes estivales de la région. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : 95% des usagers réguliers se voient ainsi privés d’accès à ce lieu de détente qu’ils fréquentaient jusqu’alors librement.
À deux pas de la frontière, cette mesure crée un véritable électrochoc. Les refus d’entrée se multiplient déjà, rapporte le quotidien La Razón. Des familles françaises, venues comme chaque été profiter de cette piscine de proximité, se retrouvent face à une interdiction qu’elles n’avaient pas anticipée.
La municipalité annonce une application stricte de cette règle jusqu’au 31 août 2025. Une temporalité qui n’apaise en rien les tensions naissantes dans cette zone frontalière habituée aux échanges transfrontaliers quotidiens.
Face à la vague de contestations, Philippe Eggertswyler ne recule pas. Le maire de Porrentruy assume pleinement cette décision controversée et réfute catégoriquement toute accusation de discrimination.
« Assurer la sécurité des usagers dans et autour de la piscine, d’une part, et préserver un environnement serein, respectueux et sûr, d’autre part », explique-t-il pour justifier cette mesure inédite. Le discours officiel martèle un objectif : restaurer « une atmosphère calme et respectueuse » dans cet espace public municipal.
L’élu revendique la légitimité de son action avec une formule sans équivoque : « Être élu, c’est assumer des responsabilités, et les élus assument leurs responsabilités. » Une phrase qui résonne comme un manifeste politique dans cette affaire qui dépasse désormais les simples considérations de gestion municipale.
Selon la municipalité, cette interdiction temporaire vise prioritairement à protéger les usagers locaux et à garantir leur accès à un service public qu’ils financent par leurs impôts. « Il faut aborder le problème différemment », insiste le maire, qui présente sa décision comme un choix pragmatique face à une situation devenue ingérable.
Les autorités suisses se défendent de toute velléité discriminatoire, présentant cette mesure comme une réponse proportionnée à des dysfonctionnements répétés. Une justification qui ne suffit pas à éteindre les critiques.
Derrière cette justification officielle se cachent des faits concrets qui ont poussé les autorités à l’action. Ces derniers mois, la piscine de Porrentruy a été le théâtre d’incidents répétés qui ont alarmé la municipalité.
Vols, insultes, dégradations et comportements agressifs : le catalogue des dysfonctionnements signalés dresse un tableau préoccupant. Les incidents se sont multipliés, transformant progressivement cet espace de détente en zone de tensions. « Des comportements jugés inappropriés », selon les mots choisis du maire, qui traduisent une réalité bien plus brutale.
Ces débordements ont directement visé les usagers locaux, créant un climat d’insécurité qui a fini par rendre l’accès à la piscine problématique pour les habitants de la commune. Les autorités évoquent une dégradation progressive de l’atmosphère lors des précédentes périodes estivales.
Face à cette escalade, la municipalité a choisi une réponse radicale. « Il faut aborder le problème différemment », répète Philippe Eggertswyler, qui présente cette interdiction comme un choix pragmatique face à une situation devenue ingérable. L’objectif affiché : protéger les usagers locaux et restaurer le calme dans cet espace public municipal.
Pourtant, cette approche suscite de vives critiques. Pour certains observateurs, la décision prend des allures de sanction collective qui frappe indistinctement tous les visiteurs français, qu’ils soient ou non responsables des incidents dénoncés.
Cette sanction collective soulève une question cruciale : jusqu’où et jusqu’à quand ? Officiellement, l’interdiction reste limitée à l’été 2025. Officieusement, les autorités laissent planer le doute sur son avenir.
« Tout dépendra du comportement des usagers et du déroulement des événements », glisse Philippe Eggertswyler, ouvrant la porte à une prolongation au-delà du 31 août. Cette formulation ambiguë transforme une mesure supposée temporaire en épée de Damoclès permanente.
La controverse dépasse désormais les frontières suisses. En Espagne, les réactions se multiplient sur les réseaux sociaux. Une jeune femme résidant en Suisse a relayé l’information avec une ironie mordante : « Je trouve cela très drôle. » Un commentaire qui souligne l’étonnement international face à cette situation inédite.
Le caractère inhabituel de cette interdiction ne passe pas inaperçu. Rarement une commune a pris une mesure aussi radicale pour gérer les tensions estivales dans un équipement public. D’autres municipalités frontalières observent attentivement l’évolution de la situation à Porrentruy.
Car au-delà du cas particulier, cette décision pourrait bien servir de précédent. Si l’expérience s’avère concluante aux yeux des autorités locales, elle pourrait inspirer d’autres communes confrontées aux mêmes défis lors des périodes touristiques. Un scénario qui transformerait une polémique locale en modèle de gestion controversé.